Dans le cadre de la commande publique, les acheteurs doivent respecter une série de règles strictes visant à garantir la transparence, la concurrence et l'efficacité dans l'attribution des marchés. Parmi ces règles figure le respect des seuils financiers, qui déterminent les procédures à suivre pour l'attribution d'un marché. Ainsi, en France, le seuil de 40 000 euros est une limite clé : en deçà de ce montant, un acheteur public peut attribuer un marché sans passer par une procédure formelle de consultation. Cela soulève une question récurrente : un acheteur peut-il diviser intentionnellement un marché en plusieurs petits lots pour rester sous ce seuil et ainsi éviter une consultation ?
La réglementation des marchés publics repose sur des principes fondamentaux, notamment la liberté d'accès à la commande publique, l'égalité de traitement des candidats, et la transparence des procédures. Ces principes sont énoncés dans le Code de la commande publique, qui s'applique à tous les marchés publics passés par les autorités publiques ou assimilées.
Pour garantir une concurrence juste et favoriser l'efficacité de la dépense publique, les règles imposent le lancement de consultations publiques au-delà de certains seuils financiers. Le seuil de 40 000 euros est particulièrement important : en-dessous de ce montant, les acheteurs peuvent procéder à une passation directe, également appelée « marché de gré à gré », sans obligation de publicité ni de mise en concurrence formelle. Toutefois, ce seuil ne doit pas être interprété comme une porte ouverte à des pratiques de contournement.
Le fractionnement artificiel d’un marché consiste à scinder un besoin global en plusieurs marchés distincts pour échapper aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Cette pratique est explicitement prohibée par le Code de la commande publique, qui précise que le besoin global d'un acheteur doit être considéré dans son ensemble pour déterminer la procédure applicable.
L'article R. 2123-5 du Code de la commande publique stipule que « le montant estimé du besoin est calculé en tenant compte de la globalité des besoins d'un même acheteur pour la même opération ou pour des opérations de nature similaire ». Autrement dit, si un acheteur prévoit d’acquérir des biens ou services d’une même nature ou liés à un même projet, il doit en estimer le montant total sur une période donnée, et non pas diviser artificiellement ces acquisitions en petits marchés pour contourner le seuil des 40 000 euros.
Le fractionnement de marché est donc clairement interdit, car il constitue une atteinte aux principes de transparence et de concurrence. En cas de recours à cette pratique, l'acheteur public s'expose à des sanctions administratives ou à des recours contentieux de la part d’entreprises évincées qui estiment avoir été lésées par l’absence de mise en concurrence.
Les conséquences juridiques d’un fractionnement illégal peuvent être lourdes pour l’acheteur public. Les contrôles de la commande publique, effectués notamment par la Cour des comptes, les chambres régionales des comptes ou les autorités de tutelle, peuvent révéler cette pratique et entraîner des sanctions.
En cas de contentieux, une entreprise évincée peut saisir le juge administratif pour contester l’attribution d’un marché qu’elle estime avoir été fractionné de manière abusive. Le juge pourrait alors annuler le marché concerné, contraignant l’acheteur à relancer une procédure dans les règles de l’art.
Par ailleurs, le risque est aussi financier. En cas d’annulation du marché, l’acheteur pourrait être contraint de payer des indemnités à l’entreprise évincée ou de faire face à des retards dans l’exécution de ses projets. Dans les cas les plus graves, une faute de gestion pourrait même être retenue à l’encontre des responsables publics, avec des répercussions disciplinaires ou pénales.
Bien qu'il soit interdit de fractionner un marché pour éviter une consultation, il existe des solutions pour les acheteurs publics qui souhaitent répondre à leurs besoins sans nécessairement recourir à des procédures lourdes et complexes.
La notion de lots séparés
La règlementation permet de diviser un marché en plusieurs lots, à condition que cela réponde à une logique économique et technique. Chaque lot peut alors faire l’objet d’une consultation séparée, avec ses propres modalités et seuils. Toutefois, cette pratique n’est légale que si chaque lot répond à un besoin spécifique distinct, et non si le découpage est artificiel pour contourner les seuils. Si le montant total de l’ensemble des lots dépasse 40 000 euros, une procédure formelle est requise.
L’achat direct pour les petits montants
Pour des besoins ponctuels ou peu élevés, qui restent légitimement sous le seuil de 40 000 euros, l’acheteur peut recourir à un marché de gré à gré. Cependant, il est recommandé de respecter les principes de la commande publique même pour les achats inférieurs à ce seuil. Par exemple, l’acheteur peut solliciter plusieurs devis pour garantir la concurrence et obtenir le meilleur rapport qualité-prix.
Les accords-cadres
Un autre mécanisme souvent utilisé est l’accord-cadre. Il permet à l’acheteur public de signer un contrat avec un ou plusieurs opérateurs économiques pour des achats successifs dans une certaine limite financière ou temporelle. Cela permet de répondre à des besoins récurrents tout en évitant de lancer une procédure formelle à chaque achat, tout en respectant les seuils.
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